
“L’exemple, ce n’est pas le meilleur moyen de convaincre, c’est le seul.”
Jean-Claude MENSCH, Maire d’Ungersheim
L’association les “Maires pour la Planète” recense les belles initiatives des communes pour les partager et nous inspirer. Cette fois-ci, ce n’est pas de Charente-Maritime que nous vient ce témoignage mais d’Alsace, celui du maire de la commune d’Ungersheim, 2500 habitants, pionnière dans la transition écologique.
Maire depuis 1989, Jean-Claude Mensch s’est battu sans relâche pour améliorer la vie de ses habitants. Son objectif est d’atteindre une triple autonomie : alimentaire, énergétique et intellectuelle. La première étape de cette longue transition a été d’obtenir l’adhésion des habitants. « Il faut diversifier les actions et surtout justifier les résultats. L’écologie politique n’est pas assez pragmatique », regrette-t-il avant d’afficher sa priorité : « Améliorer la vie de la population dans un environnement sain. » Selon lui, « l’exemple, ce n’est pas le meilleur moyen de convaincre, c’est le seul ». C’est aussi en s’inspirant des théories de Rob Hopkins enseignant à Totnes en Angleterre que le maire a réussi cette transition.
Implication des citoyens
A Ungersheim, l’implication des citoyens dans les projets de la commune a été primordiale en sachant pertinemment que la démarche n’attirera qu’une partie de la population. Il s’est d’abord adressé aux forces vives et investies du territoire et il a multiplié les petites actions avec divers acteurs locaux (associations, élus, habitants). « Ça commence toujours par un mouvement minoritaire qui par la suite sensibilise, essaime et fait bouger les lignes » assure t-il. Le point de départ de la transition écologique de la commune a été une installation solaire thermique de 120 m² sur le toit de la piscine en 2000, prolongée par toute une série d’actions tant sur le plan énergétique, alimentaire, qu’environnemental. Il en a résulté l’élaboration dès 2011 d’un programme de 21 actions, toutes réalisées à ce jour.
Alimentation
Du côté de l’alimentation, la commune est largement pionnière avec sa cantine 100% bio depuis 2009. C’est le jardin du trèfle rouge, une exploitation maraîchère de 12 hectares appartenant à la commune, qui fournit les habitants en légumes de toutes sortes. Cette exploitation utilise des semences anciennes et biologiques moins consommatrices d’eau. L’exploitation fait appel à des chantiers d’insertion et propose aux habitants de participer à cette démarche. En revanche, l’autosuffisance à 100% est compliquée à atteindre, nous confie le maire, car il est difficile de se passer de condiments ou de certaines céréales comme le riz, qui ne poussent pas localement.
Énergie
En 2012, la commune acquiert une friche de 6 hectares et implante une ferme photovoltaïque sur toitures, la plus grande d’Alsace. Celle-ci est raccordée au réseau ENEDIS et permet d’alimenter en électricité 8 000 personnes à l’année. Une chaufferie à bois alimente aujourd’hui 7 bâtiments communaux. Le passage aux LEDs de l’éclairage public avec extinction partielle a également permis à la commune de réaliser une économie de 15 000 euros annuel. Concernant les projets futurs, une usine de méthanisation verra bientôt le jour, le permis de construire venant d’être accordé. L’autonomie énergétique totale industrie et chauffage inclus sera atteinte d’ici 2024.
Logement
Lorsque l’héritier d’un industriel suisse met en vente le domaine Champré, une forêt de 22 hectares ainsi que 2 hectares de parc, le conseil municipal saisit l’opportunité et l’achète afin d’en faire un site d’urbanisation innovant en 2014. L’éco hameau rassemble aujourd’hui une dizaine d’habitations autonomes en énergie (zéro carbone – énergie positive sur le bilan annuel) avec une mixité générationnelle. Une deuxième tranche de 15 habitations est en route.
Économie locale
En 2013, la commune d’Ungersheim lance sa monnaie locale : le radis (1 euro = 1 radis). Aujourd’hui, 9 commerces locaux (paysan boulanger, éleveur, associations, maison des jeunes etc.) acceptent cette monnaie et entre 5 et 10% des foyers l’utilisent. « Ce n’est pas suffisant mais c’est déjà pas mal » assure le maire. « C’est avant tout un outil de sensibilisation qui s’ajoute aux autres actions ». Pour inciter les habitants à l’utiliser, la commune lance des promotions à certaines périodes de l’année par exemple en accordant une réduction de 25 % sur le périscolaire. A Noël dernier, la commune a également offert des « radis » aux personnes âgées de la commune qui n’avaient pas pu célébrer cette fête. Le personnel communal touche une prime en « radis ». Ces actions permettent ainsi de soutenir l’économie locale et de favoriser les commerces de proximité. Cette démarche est soutenue et gérée par une petite équipe de bénévoles.
Transport
Tous les matins d’école à Ungersheim, ce n’est pas un bus que l’on voit passer mais une calèche. En effet, Richelieu et ses deux compagnons sont les braves chevaux qui transportent les enfants à l’école depuis 2008. Le but est de faciliter le transport des enfants qui habitent le plus loin de l’école pour éviter la circulation de voitures le matin et le soir et les enfants sont ravis d’aller à l’école avec ce mode de transport. Les chevaux participent également au maraîchage dans le jardin du trèfle rouge.
Conseils du maire
La commune d’Ungersheim est un bel exemple de réussite et son maire peut nous apprendre beaucoup. En 2021, sa commune a été élue « meilleure petite ville de France pour la biodiversité ». Jean-Claude Mensch, insiste : « il ne faut pas de compétence particulière, il faut du bon sens et de la volonté ! Aujourd’hui, il y a un terrain de plus en plus favorable car il y a une prise de conscience sociale grandissante et toutes les petites actions comptent ». Il conseille aussi de réorienter les politiques publiques communales en faveur de la transition écologique, par la réduction des dépenses et une mobilisation optimale des subventions, entre autres.
Toutes ces actions génèrent des résultats tangibles sur le budget de fonctionnement et malgré les baisses de dotation de l’état, ils n’augmentent plus les impôts communaux depuis 2005.